LE LECTEUR

Révision février 2024

La lecture, notamment celle des livres d'idées, a toujours constitué pour l'auteur un contre-point utile à la recherche scientifique qui fut son métier pendant près de 40 ans (Google scholar). Il a notamment été (et reste) intéressé à titre personnel par l'épistémologie de la biologie et de la médecine. Il a toujours déploré que l'on pratique la science en myope et qu'on laisse si peu de place à la réflexion sur les disciplines dont elle est faite. 

La retraite lui laisse le temps d'approfondir son intérêt spontané pour la littérature d'idées en général, d'en concevoir de véritables sujets d'étude, liés plus largement à ce qu'il appelle son projet existentiel, tel du moins que l'écriture personnelle peut en rendre compte. Il compose des programmes de lecture ajustés à ses objectifs. Il écrit sous diverses formes : du très subjectif journal du lecteur (période 2014-18, révisé en 2023) aux plus objectifs résumés détaillés d'ouvrages, notamment ceux de Bergson, d'une part, et ceux de Bachelard consacrés à l'imagination des éléments, d'autre part.

De 2014 à 2023 (période interrompue de 2018 à 2022 par des travaux historiques dans le domaine médical et vétérinaire), l'initiation philosophique a permis au lecteur de découvrir un territoire de pensée familier et de formuler une sorte de synthèse doctrinale, tout cela étant rapporté, pas à pas, dans le journal du lecteur. La pensée dispersée du début s'est ainsi resserrée autour de quatre axes thématiques personnels, à forte résonance autobiographique :

(1) la réception du monde extérieur (cosmos, nature, temps, espace, éléments) ;
(2) la réalité du soi, sa part dans l'identité individuelle, l'importance de l'altérité; 
(3) Les temps de l'existence, de la mémoire et de l'histoire;
(4) La notion d'idéal dans la conduite de l'intellect, l'existence théorétique.

Ces thèmes croisent les motifs principaux du testament philosophique, qui les orchestre et les rattache de manière concrète à l'existence du lecteur en tant que personne générique, c'est-à-dire à la fois singulière et faite de tout ce dont les autres sont faits. 

Entre autres effets positifs, le Journal a par ailleurs contribué à affranchir le lecteur de deux notions existentialistes, l'être et le soi, qui, par leur côté pesant et obsessionnel, entravaient l'engagement intellectuel sans permettre de reconstituer l'unité de la personne. Paradoxalement, c'est leur sacrifice, dans une véritable cure psychologique, qui a permis de reconstituer l'unité mais aussi la continuité du sentiment de l'existence (voir le billet: L'écriture de soi et l'usager des mots).

Mon livre le Bâillement de Socrate, issu du journal après une sévère révision (janvier 2024), marque la fin, non pas d'une saison de lecture, mais d'une décennie entière de réflexion sur la place des idées dans ma vie et sur ma place dans le monde des idées. La priorité y est donnée à l'autographie plus qu'à l'autobiographie. Il s'est agi de mobiliser tous les matériaux visant à renforcer le sentiment de l'existence et de définir les mondes de référence dans lesquels exercer ce sentiment, et de quelle manière. 

C'est un livre essentiellement utile ayant abouti, notamment, à la formulation d'un testament philosophique personnel qui définit, tout en l'élargissant, l'espace mental où accueillir les futures moissons de la vie et notamment celles de la libre lecture. La question d'une suite à ce blog ne se pose donc plus au moment où j'écris ces mots.

Mise à jour : février 2024
jean.de-rycke@orange.fr